"psychologue, psychotherapeute, TCC, psychopraticienne, psycho-praticienne"

Les troubles du sommeil pris en charge par les thérapies cognitives et comportementales

12/01/2025

Les troubles du sommeil pris en charge par les thérapies cognitives et comportementales

Le temps passé à dormir représente plus d’un tiers de notre vie. D’après le baromètre de Santé Publique France, le temps de sommeil des adultes était en moyenne de 6 heures 42 minutes par 24 heures durant la semaine (ou les jours travaillés) en 2017, soit en dessous des 7 heures minimales quotidiennes habituellement recommandées. Il était de 7 h 26 le week-end (ou les jours de repos), conduisant au final à un temps moyen de sommeil de 6 h 55. (Source : site de l’INSERM).

Qu’est-ce que le sommeil ?

Deux états physiologiques fondamentaux, les états de veille et de sommeil, rythment notre vie.

Le sommeil est constitué de différents stades qui s’ordonnent de façon identique au cours de la nuit. Notre sommeil n’est donc pas continu. De plus, en fonction de l’âge, la durée du sommeil ainsi que la répartition des stades de sommeil sont différents. Les mêmes stades de sommeil existent chez les enfants, les adultes et les personnes âgées mais les variations inter et intra-individuelles sont nombreuses.

Ces stades sont le sommeil lent (ou sommeil calme chez le bébé) et le sommeil paradoxal.

Le sommeil est constitué de plusieurs cycles successifs compris entre 3 et 6. Un cycle de sommeil dure environ de 60 à 120 minutes. Le cycle est composé de plusieurs phases de sommeil lent puis de sommeil paradoxal. Chaque cycle débute par du sommeil léger et finit par du sommeil paradoxal. Chaque stade du sommeil se caractérise par une activité cérébrale particulière, associée à des ondes électriques mises en évidence par électroencéphalographie (EEG).   

  • Le sommeil lent est déterminé par des ondes lentes. Il est composé de plusieurs stades : après une phase de transition (N1) de quelques minutes entre la veille et le sommeil, la phase de sommeil léger (N2) se met en place. Les muscles se détendent, la température corporelle, la pression artérielle et l’activité cardiaque diminuent. Une phase de sommeil progressivement plus profond (N3) s’installe et dure plusieurs dizaines de minutes. Le dormeur est de plus en plus insensible aux stimulations extérieures. L’EEG montre pendant cette phase la présence d’ondes de grande amplitude et de faible fréquence. Le cerveau a réduit sa consommation en oxygène et le métabolisme cérébral est ralenti. Le tonus musculaire est réduit mais partiellement présent, d’où l’explication d’épisodes de somnambulisme.
  • Le sommeil paradoxal présente une activité cérébrale proche de celle de la phase d’éveil. Il est aussi appelé période REM (Rapid Eye Mouvement) en raison de fréquents mouvements oculaires rapides (sous les paupières fermées). Le tonus musculaire est inexistant, exception faite de quelques mouvements des extrémités des membres. La pression artérielle et le rythme respiratoire connaissent des changements fréquents. C’est pendant ce sommeil paradoxal que les rêves restent en mémoire. Les rêves sont aussi présents pendant le sommeil lent léger, ils sont d’une intensité plus faible et ils ont pour objet des idées abstraites.

Le sommeil lent profond est essentiellement présent dans la première moitié de la nuit alors que les sommeils légers et paradoxaux sont plus nombreux en seconde moitié de nuit. Cela explique les rêves en fin de nuit. Si la nuit précédente a été mauvaise, le sommeil lent sera d’autant plus profond la nuit suivante.

 

 

 Il est usuel de représenter l’évolution de la nuit et des cycles de sommeil sous forme d’un hypnogramme. Les cycles contiennent des proportions variables de sommeil N1, N2, N3 et de sommeil paradoxal.

 

 

 

 

 

Typologie du sommeil :

Le sommeil lent se divise en 3 parties : l'endormissement, le sommeil lent léger et le sommeil lent profond tandis que le sommeil paradoxal est l’unique composante.

Phase 1 ou N1 : L’endormissement (5 à 10% du sommeil)

L'endormissement est le premier stade du sommeil. Il est traduit par la transition entre éveil et sommeil. A ce stade, le dormeur est encore facile à réveiller : nous luttons pour ne pas dormir, ce stade est surtout caractérisé par le changement d’état rapide entre l’éveil et le sommeil. On parle de micro- sommeil.

Du côté physiologique, le tonus musculaire et le mouvement oculaires diminuent progressivement et la respiration prend un rythme régulier.

Phase 2 ou N2 : Sommeil lent et léger (45 à 55 % du sommeil de l’adulte)

Le sommeil lent et léger est le premier stade du sommeil. Nous passons à ce stade 30 à 45 minutes après l’endormissement. Le dormeur reste très sensible à l’environnement externe. Comme au premier stade, il suffit d’un bruit ou d’une lumière intense pour le réveiller.

Du côté physiologique, le tonus musculaire et les mouvements oculaires ne cessent de diminuer, la respiration ralentit. On remarque également des ondes cérébrales lentes et une température corporelle qui diminue.

Phase 3 et 4 ou N3 : sommeil profond : (15 à 20% du sommeil de l’adulte)

Le dormeur passe au stade du sommeil lent profond, stade suivant le sommeil lent léger. Pendant ce stade, il est difficile de réveiller le dormeur.

Du côté physiologique, les muscles se relâchent, les mouvements oculaires cessent, le rythme cardiaque et respiratoire sont de plus en plus paisibles et la température corporelle diminue. Enfin, les ondes cérébrales sont lentes et amples et les activités des fonctions vitales ralentissent.

Le sommeil profond est le sommeil le plus réparateur. Il permet la récupération de la fatigue physique. Alors, le foie, le cerveau et les muscles se rétablissent en énergie. L’hormone de croissance est secrétée et la régulation de la glycémie se réalise.

Phase 5 : Sommeil paradoxal : (10 à 15% du sommeil de l’adulte)

Après le sommeil lent, le dormeur passe au stade du sommeil paradoxal. C’est le stade durant lequel nous faisons des rêves.

Du côté physiologique, le tonus musculaire cesse alors que les mouvements oculaires sont de plus en plus soutenus. Le rythme cardiaque ainsi que la fréquence respiratoire deviennent irréguliers et la température corporelle augmente. Enfin, les ondes cérébrales sont très rapides.

Le sommeil paradoxal permet la consolidation de notre mémoire et la récupération émotionnelle.

Alternance veille et sommeil

Le rythme circadien (rythme biologique) est un cycle de 24 heures (voire 25 heures) et il permet au corps de s’adapter à son environnement et, tout particulièrement, à l’alternance veille et sommeil. La lumière du jour en est le premier principe.

Lorsque le corps ressent qu’il fait nuit, la mélatonine est sécrétée. Cette hormone nous permet de de synchroniser le rythme veille-sommeil et donc de mesurer le temps. Lors du réveil, les hormones de l’éveil (cortisol), de l’énergie et du bonheur sont sécrétées, ce qui nous rend énergique dès le matin.

Le cortisol est secrété en pic par l’organisme en début de matinée pour préparer le corps à être éveillé et en forme toute la journée.

Dette et régulation homéostatique

La dette homéostatique est semblable à toutes les dettes : il faut les rembourser. Une dette homéostatique est en effet une dette de sommeil, plus nous restons éveillé, plus notre dette et la pression du sommeil augmentent.

En conséquence, la compensation du sommeil se fera au fur et à mesure de la nuit suivante. Du côté du cycle du sommeil, il y aura une augmentation de la durée du sommeil lent. La durée du sommeil de la nuit suivante est toujours beaucoup plus longue

 

 

 

 

 

Qu’est-ce que l’endormissement ?

L’endormissement est lié à plusieurs facteurs provoquant le blocage des centres de l’éveil dans le cerveau, et faisant tomber dans le sommeil.

Ces facteurs découlent

  • des processus homéostasiques ou régulation des fonctions de l’organisme. Ceux-ci augmentent le besoin du sommeil au fur et à mesure que la période de veille se prolonge.
  • des processus circadiens qui synchronisent l’organisme et le sommeil sur l’alternance jour-nuit avec une rythmicité proche de 24 heures voire 25 heures.
    • Le déclenchement du sommeil est sous la dépendance hormonale de la mélatonine. Elle est aussi appelée l’hormone du sommeil et elle est produite en situation d’obscurité. Si elle est libérée en début de nuit, elle favorise le déclenchement du sommeil.
    • La sérotonine ne provoque pas directement le sommeil, mais elle est intimement liée à la régulation du sommeil puisqu’elle a un rôle dans la production de mélatonine.
    • Le tryptophane est le précurseur de la sérotonine. Indirectement, le tryptophane est donc également à l’origine de la synthèse de la mélatonine.
    • L’adénosine est l’hormone de l’endormissement. C’est une hormone dont la production et la libération se font en fonction de la demande énergétique pendant la période d’éveil. Pour résumé, plus nous bougeons et sommes actifs, plus on libère de l’adénosine, qui s’accumule tout au long de la journée. Elle provoque l’endormissement lorsqu’elle atteint un certain taux.
    • Si la rétine détecte la lumière, alors la mélatonine est bloquée
      • Rôle des cellules ganglionnaires à mélanopsine de la rétine servant à synchroniser le sommeil sur l’alternance jour-nuit,
      • l’usage tardif d’écrans ou de lumière LED, riches en lumière bleue, stimule ces cellules et retarde l’endormissement.
      • Rôle des gènes « horloge » (CLOCK, BMAL, Per, Cry, Reverb…) liés selon l’information reçue par les cellules rétiniennes, la mélatonine et d’autres facteurs synchroniseurs
    • Lors du vieillissement, de nombreux troubles du sommeil apparaissent parce que la production de la mélatonine est de moins en moins performante
    • L’hygiène de vie, les consommations d’alcool, de substances excitantes... ou encore l’environnement immédiat (lumière, bruit…) sont des facteurs contribuant au retard d’endormissement

 

La fonction du sommeil est aujourd’hui prouvée, et tout particulièrement, dans

  • la croissance,
  • la maturation cérébrale, les mécanismes d’apprentissage et de mémorisation ainsi que la conservation des capacités cognitives.
  • Le repos du système cardiovasculaire.
  • Le maintien de la température corporelle pendant 24 heures
  • La régulation de nombreuses sécrétions hormonales
  • La régulation de fonctions et en particulier la glycémie. Dans le cas d’une perturbation du métabolisme du sucre, il existe des risques de surpoids voire d’obésité et de l’apparition du diabète
  • L’élimination des toxines
  • La régénération des réserves énergétiques des cellules musculaires et nerveuses
  • La régénération cellulaire dont la peau et les muscles
  • La production d’hormones dont l’hormone de croissance et la mélatonine.
  • La restauration ou stimulation des défenses immunitaires.
  • La régulation de l’humeur et de l’activation du stress.
  • la récupération physique et intellectuelle
  • la préparation à l’état de veille.

Les conséquences d’un mauvais sommeil sont multiples :

  • risques de somnolence avec les conséquences d’endormissement, par exemple, lors de la conduite d’un véhicule ou d’une machine, de troubles de l’attention (élèves qui décrochent en classe), plus nombreux accidents dans la sphère domestique. De plus, ce déficit accompagne de nombreux troubles psychologiques ou psychiatriques dont des troubles de l’humeur (dépression) et de la capacité à gérer le stress (anxiété). En outre, chacun d’entre nous a déjà expérimenté la qualité de vie après une nuit sans sommeil…
  • Plus particulièrement, d’un point de vue socio-professionnel,
    • baisse de la qualité de vie,
    • baisse de la satisfaction personnelle,
    • fort taux d’absentéisme,
    • baisse de productivité,
    • accidents du travail majorés, risques accrus d’erreurs et d’handicaps. D’ailleurs, une étude au Royaume-Uni a révélé que l’insomnie était associée à une augmentation de 75 à 88 % de risques qu’un accident entraîne une incapacité permanente de travail.
    • Augmentation de la fatigue
    • Augmentation de l’irritabilité
    • baisse d’énergie
    • baisse de la concentration
    • baisse de la motivation
    • apparition ou augmentation des difficultés relationnelles
  • Plus particulièrement, d’un point de vue médical,
    • Survenue ou accroissement de l’hypertension artérielle,
    • Survenue ou accroissement du diabète,
    • Survenue ou accroissement du syndrome métabolique,
    • Survenue de l’infarctus du myocarde
    • Sur le plan neurologique, elle est associée à un risque
      • d’accidents vasculaires cérébraux,
      • de migraines et céphalées de tension.
    • perturbation des réactions immunitaires conduisant à un risque majoré de développer un virus en y étant exposé, ou encore une moins bonne réaction aux vaccinations.
    • Survenue ou accroissement des troubles de l’humeur et du comportement
    • Sur le plan psychiatrique,
      • l’insomnie peut être est responsable d’anxiété, de dépression
      • d’addictions et tout particulièrement d’alcoolodépendance

Il est à noter qu’une une relation bidirectionnelle existe entre insomnie et des pathologies telles que la dépression et l’alcoolodépendance

    • lien entre la durée du sommeil et l’espérance de vie.

 

Les chiffres de l’insomnie chronique

Celle-ci varie entre 10 et 15 % de la population générale adulte selon les études réalisées.

En 2017, un sondage du Baromètre de Santé publique France a été réalisé sur 12 637 sujets âgés de 18 à 75 ans représentatifs de la population française. 13,1 % de la population âgée de 18 à 75 ans déclare des symptômes évoquant une insomnie chronique. Les femmes sont environ deux fois plus nombreuses que les hommes à connaitre ce trouble du sommeil (16,9 % des femmes et 9,1 % des hommes).

Il est à noter que parmi la population générale, un tiers des personnes rapporte des difficultés occasionnelles de sommeil.

L’insomnie chronique est souvent associée à des comorbidités qui doivent être déterminées afin de choisir la meilleure prise en charge. L’examen clinique complet est bien entendu à la charge d’un médecin. Le psycho-praticien prendra toutes les précautions possibles à l’aide de questionnaires et d’un interrogatoire le plus exhaustif possible pour rediriger le client vers un professionnel de santé au moindre doute.

Ainsi, des pathologies somatiques peuvent être impliquées dans l’insomnie chronique. Certaines sont liées à des douleurs et, tout particulièrement, les pathologies rhumatismales ou neurologiques, d’autres conduisent à une gêne physique, comme le reflux gastro-œsophagien ou la broncho-pneumopathie chronique obstructive ainsi que certains troubles endocriniens tels que les dysthyroïdies ou encore pathologies néoplasiques avec altération de l’état général.

Par ailleurs, des pathologies spécifiques au sommeil sont à prendre en compte : syndrome des jambes sans repos, syndrome d’apnées du sommeil et syndrome de mouvements périodiques des jambes au cours du sommeil.

En outre, la dépression et l’anxiété sont les pathologies psychiatriques les plus fréquentes et sont recherchées par des questionnaires. Il est également important d’investiguer la consommation de toxiques (alcool, produits stupéfiants…).

Enfin, il est nécessaire de connaitre l’ensemble des traitements médicamenteux suivis par le patient. En effet, certaines médications peuvent être responsable d’insomnie chronique. Nous pouvons citer antidépresseurs, amphétaminiques, antiparkinsoniens, bêta-bloquants, corticoïdes, ou encore la nicotine.

Comment est définie l’insomnie chronique ?

Ce syndrome se caractérise par :

  • des difficultés à s’endormir,
  • et/ou  à rester endormi (réveils nocturnes plus ou moins longs et nombreux),
  • et/ou  des réveils matinaux précoces sans possibilité de se rendormir,
  • et/ou un sommeil non reposant ou non réparateur,

ceci au moins 3 fois par semaine, pendant au moins 3 mois selon les classifications CIM-10 (1), DSM-5 (2)  et ISCD-3 (3).

  1. La classification internationale des maladies, 10e révision (CIM-10) est une classification statistique non exclusivement médicale codant notamment les maladies, signes, symptômes, circonstances sociales et causes externes de maladies ou de blessures, publiée par l'Organisation mondiale de la santé (OMS)1.
  2. Le DSM-5 est la cinquième et plus récente édition, publiée en 2022, du Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux, et des troubles psychiatriques (en anglais : Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorders) de l'Association américaine de psychiatrie (APA, en anglais : American Psychiatric Association).
  3. The International Classification of Sleep Disorders (ICSD) is the premiere clinical text for the diagnosis of sleep disorders. Due to the exponential growth in knowledge of sleep disorders, the American Academy of Sleep Medicine’s Board of Directors assembled a group of expert clinicians and researchers to revise the text of the third edition of the ICSD (published in 2014). Released in June 2023, this text revision was based on an extensive review of the current literature and features new and updated information in the text of each chapter, minor corrections, and some criteria changes (see Summary of Diagnostic Criteria Changes resource). Sleep disorders are grouped into six major categories in the ICSD-3-TR:

Il existe deux grands types d’insomnie :

  • L’insomnie chronique sans comorbidité dont
    • L’insomnie psychophysiologique qui est la plus représentée. Elle se distingue par un conditionnement mental et physiologique qui luttent contre le sommeil (dans cette catégorie, exclusion des troubles anxieux ou dépressifs).
    • L’insomnie paradoxale ou par mauvaise perception du sommeil : les griefs d’insomnie cohabitent avec des résultats normaux d’enregistrements de sommeil.
    • L’insomnie idiopathique : elle démarre dans l’enfance et reste stable dans le temps.
  • L’insomnie avec comorbidité :
    • Liée à des pathologies mentales dont état dépressif, trouble bipolaire, trouble anxieux généralisé, attaque de panique, troubles obsessionnels compulsifs…
    • Liée à une pathologie physique dont épilepsie, pathologie douloureuse, hyperthyroïdie, troubles respiratoires, cardiopathie, neuropathies, reflux gastro-oesophagien…

Les causes de l’insomnie

Les causes d’une insomnie chronique sont multiples :

  • Des facteurs prédisposants ou de vulnérabilité tels que
    • le sexe féminin,
    • l’âge,
    • des facteurs génétiques
    • une hyperréactivité psychophysiologique, et
    • des facteurs environnementaux (température, bruit, lumière)
    • certains traits de personnalités (tempérament anxieux ou perfectionniste) ou prédispositions familiales.

 

  • Des facteurs déclenchants :
    • évènement affectif (évènement de vie, deuil, séparation, arrivée d’un enfant…)
    • ajustement professionnel,
    • évènement vital important, conduisant à de l’anxiété, du stress, à un épisode dépressif,
    • certaines personnes retrouvent un sommeil normal une fois l’élément déclencheur a disparu ou est atténué alors que d’autres garderont une insomnie malgré la disparition ou l’atténuation de l’élément déclencheur.
    •  
  • Des facteurs perpétuants ou de maintien:
    • comportements inadaptés (siestes compensatrices, limitation des activités diurnes, rallongement volontaire de la durée passée au lit par rapport au besoin de sommeil, sport en fin de journée pour se fatiguer physiquement),
    • processus cognitifs et fausses croyances dont rumination anxieuse sur la perte de sommeil, crainte de ne plus pouvoir « contrôler » son sommeil, avec un conditionnement négatif associé au lit et à la chambre à coucher, irritation ou frustration de ne pas dormir … anxiété de performance et inquiétudes relatives aux conséquences de l’insomnie

 

Les thérapies cognitives et comportementales (TCC) dans l’insomnie : une efficacité reconnue

L’ efficacité de la thérapie cognitive et comportementale pour l’insomnie a été prouvée par des méta-analyses en 2017 et 2019 relative à

  • la sévérité de l’insomnie,
  • l’efficience du sommeil,
  • les réveils nocturnes et
  • la latence d’endormissement.

L’efficacité de cette thérapie n’est pas immédiate mais les effets sont durables dans le temps. Il faut tout de même préciser que le nombre de séances est d’un peu moins de dix lorsqu’aucune comorbidité n’est associée.

Cette thérapie est recommandée en traitement de première intention de l’insomnie chronique de l’adulte, y compris du sujet âgé, par le Collège Américain de Médecine Interne ainsi que par la Société Européenne de Recherche sur le Sommeil.

Avant d’entreprendre la thérapie, le client va passer un entretien complet et également des questionnaires et échelles de façon à bien analyser la situation et ne prendre aucun risque de négliger un trouble médical. Par ce biais, il sera possible de détecter toute comorbidité parce que la prise en charge prendra en compte les troubles associés. Les échelles ainsi que les questionnaires vont permettre aussi d’avoir une ligne de base parce qu’ils seront passés à nouveau en milieu de parcours et en fin de parcours. L’objectif est d’obtenir des mesures fiables permettant de juger si la thérapie est efficiente. Sinon, il faut en recherche les causes et utiliser d’autres méthodes ou outils.

Les thérapies cognitive et comportementales reposent donc sur un modèle scientifique capable de suivre rigoureusement le client. L’alliance thérapeutique est de plus primordiale. En effet, sans elle, peu de chances de succès, si le client ne sent pas un accueil bienveillant, sans jugement et empathique. Enfin, le client sera actif dans sa prise en charge et sera aussi motivé pour que les apprentissages fonctionnent.

L’insomnie chronique va donc être prise en charge par la thérapie avec

1/           L’Éducation Thérapeutique du Patient (ETP), pour comprendre et expliquer

  • qu’est-ce que le sommeil ? »,
  • qu’est-ce qu’un bon sommeil ? »,
  • quels sont les facteurs favorisants et bloquants d’un bon sommeil ? »,
  • quelles sont les conséquences de mal dormir ? »,
  • à quoi cela sert-il de dormir ? »,
  • qu’est-ce qu’un court dormeur ou un long dormeur?,
  • quelle est la durée nécessaire du sommeil  à chacun pour se sentir en forme, et en mettant en avant la variabilité individuelle.

En outre, des informations complémentaires ou approfondies sur la typologie, la chambre à coucher, la literie,  les siestes, le ronflement du partenaire, le sommeil en couple, le nourrisson se réveillant la nuit, le stress, les écrans, l’activité physique, les rythmes de sommeil (dont heures de lever et coucher), le rôle de l’alimentation continueront d’être données lors des séances suivantes pour favoriser une appropriation et une mise en œuvre des conseils pour un meilleur sommeil… rester pro-actif et le fait de répéter est un avantage dans les apprentissages.

2/           La partie comportementale avec la mise en place du contrôle du stimulus et de la restriction de sommeil

La mise en place de l’agenda de sommeil va apporter de nombreuses informations sur la typologie du sommeil de la personne. Ce document va permettre de noter l’heure de coucher, l’heure de lever, la sieste, de calculer le temps de sommeil (ce qui permettra de compter le nombre d’heures habituelles de sommeil par nuit), les réveils nocturnes et le délai de réendormissement, la qualité du sommeil, la qualité du réveil, la forme de la journée (la somnolence si besoin), les activités spécifiques de la journée (par exemple, sport à 18 heures), la prise de médication (hypnotiques ou anxiolytiques, antalgiques…).

L’analyse de l’agenda va aboutir au contrôle du stimulus et de la restriction du temps passé au lit (techniques comportementales) qui sont la plupart du temps associées l’une avec l’autre pour parvenir au succès.

La restriction du temps de sommeil vise à améliorer l’efficacité́ du sommeil en réduisant le temps passé au lit. Elle conduit alors à une pression de sommeil suffisante pour assurer l’endormissement le soir suivant. En effet, la pression de sommeil est un des facteurs naturels agissant sur les cycles d’endormissement.

De nombreux insomniaques pensent améliorer leur sommeil en augmentant le temps passé au lit. Au contraire, cela va fragmenter, alléger le sommeil et perpétuer l’insomnie. L’objectif, en analysant l’agenda de sommeil, est de déterminer le temps réel de sommeil nécessaire pour l’insomniaque et au début de la prise en charge de créer une dette de sommeil pour réactiver un sommeil de meilleure qualité puisqu’il y a maintenant une pression de sommeil. Les calculs de réajustement se font semaines par semaines pour parvenir à un temps de sommeil au plus proche du besoin du client et le sommeil va alors être de meilleure qualité. Un endormissement plus rapide, un sommeil plus profond et moins fractionné sont des gains importants générés par ces thérapies pour l’insomnie. Un risque de somnolence diurne excessive en début de traitement est à signaler au patient.

Toutefois, il est important de préciser que les thérapies cognitives et comportementales ne vont pas induire des durées plus longues de sommeil parce qu’elles s’appuient sur le besoin physiologique du client. Tous les individus n’ont pas les mêmes besoins et surtout, ces besoins évoluent tout au long de la vie de façon ponctuelle ou plus pérenne.

La thérapie par contrôle du stimulus permettra, elle, d’associer le lit au sommeil. Très souvent, une personne insomniaque a tendance à rester au lit pour tenter de se rendormir et, par conséquent, un temps prolongé d’éveil au lit va se mettre en place. La perception du patient de « ne pas arriver à dormir quand il se couche » en sera amplifiée. Des conseils tels que « N’aller se coucher qu’en cas de fatigue », « se relever la nuit si l’on ne se rendort pas immédiatement » sont donnés pour favoriser le contrôle du stimulus.

Des activités incompatibles avec l’endormissement (par exemple, l’utilisation d’écrans lors du coucher ou l’anxiété anticipatoire de ne pas dormir) sont usuelles chez les insomniaques. Certains d’entre eux ont pris l’habitude (conditionnement) de s’endormir sur le canapé ou dans un fauteuil parce que leur lit est négativement associé à une anxiété de ne pas parvenir à s’endormir dans la chambre à coucher.

Les mesures comportementales de contrôle du stimulus vont à nouveau créer une association positive entre le lit, la chambre à coucher, l’heure du coucher et le sommeil et in fine une régulation du sommeil. L’objectif est d’apprendre à cette personne insomniaque à s’endormir rapidement (en moins de 30 minutes) et à maintenir son sommeil. En revanche, il est essentiel que le client évite de rester au lit lors des éveils pour renforcer l’association lit et sommeil. De plus, des apprentissages relatifs aux siestes, à un temps de latence calme, exempt d’écrans d’une heure avant le coucher, voire d’un rituel sont cruciaux.

3/           Initiation à la relaxation, respiration consciente ou pleine conscience pendant plusieurs séances avec les exercices à réaliser chaque jour à la maison pour un recentrage sur les sensations corporelles et sur l’attention à la respiration. Prise de recul par rapport aux émotions, pensées, rôle du stress et de l’anxiété (définition, compréhension, identification, conséquences et gestion)

De nombreuses méthodes existent. Elles permettent de diminuer les tensions musculaires ou psychiques. Certaines d’entre elles ciblent la tension musculaire (la relaxation musculaire progressive de Jacobson ou le training autogène de Schultz, le yoga ou le tai-chi), d’autres sont plus dévolues à la tension mentale (méditation ou l’imagerie mentale). Les préférences individuelles, l’accessibilité et la facilité d’application aideront à faire le bon choix. De plus, de nombreuses applications digitales (internet, réseaux sociaux, applications pour téléphones) ou encore des séances ou ateliers associatifs permettent la mise en pratique de la relaxation ou la méditation (qui n’est pas une méthode de relaxation. Son effet est d’une autre nature !). Le choix doit permette d’obtenir un sentiment de « lâcher-prise » et favoriser le sommeil. Idéalement, leur mise en application dans la journée doit permettre de faire baisser le stress, et lorsque la technique est bien intégrée, être utilisée pour favoriser l’endormissement ou la gestion des réveils nocturnes.

4/           Techniques cognitives pour lutter contre les pensées dysfonctionnelles relatives au sommeil

Les pensées dysfonctionnelles alimentent une anxiété qui va créer une activation cognitive et physiologique empêchant l’endormissement. L’Echelle des croyances et attitudes dysfonctionnelles à propos du sommeil (CAS) de C. Morin est l’un des questionnaires ciblant les processus cognitifs négatifs sur ce sujet.

Le thérapeute va ainsi interroger son client par un questionnement socratique (questions ouvertes), pour que le patient identifie sa problématique sous différents angles et puisse envisager un changement dans son schéma cognitif initial. Il va donc prendre conscience et comprendre ses pensées fausses sur le sommeil et peu à peu tendre vers un processus positif, encourageant des croyances favorisant le sommeil (restructuration cognitive). Celle-ci va aider le client à remettre en question son interprétation de la situation et à diminuer l’activation cognitive, émotionnelle et physiologique.

Les pensées dysfonctionnelles peuvent être

  • des objectifs irréalistes à atteindre,
  • une anxiété de performance associée au sommeil,
  • une intolérance au manque de sommeil
  • une dramatisation des conséquences du sommeil,
  • des conceptions erronées des causes de l’insomnie,
  • des croyances erronées à propos de l’utilité de certains comportements
  • blâmer l’insomnie de tous les maux.

Habituellement, le travail cognitif est accompagné des techniques comportementales.

La mise en place de ces thérapies est tout à fait possible alors que le client est déjà sous médication. Le relais entre l’arrêt des médicaments et les thérapies seules se feront sous supervision et uniquement décision du prescripteur.

La prise en charge de l’insomnie par les thérapies cognitives et comportementales a un taux de succès supérieur à 70%.

 

Bibliographie :

Effets des écrans sur le sommeil des adolescents - résultat de l’enquête du réseau Morphée auprès des collégiens et lycéens franciliens

https://www.ors-idf.org/fileadmin/DataStorageKit/ORS/Etudes/2020/sommeilMorphe/ORS_focus_sommeil_adolescent_ecrans.pdf

 

Thèse présentée à l’université de Sherbrooke comme exigence partielle du doctorat en psychologie (D.PS.) Par NADINE MOURAD M.A. - Septembre 2015

L'application d'un traitement cognitivo-comportemental de l'insomnie chez les enfants présentant un trouble réactionnel de l'attachement

https://savoirs.usherbrooke.ca/handle/11143/8800?show=full

 

 

Université De Bordeaux - UFR des Sciences médicales - Année 2019 N°123

Thèse pour l'obtention du Diplôme D'Etat De Docteur En Médecine Générale - Louise Heurtaux

Présentée et soutenue publiquement le 12 septembre 2019

Etude de la prise en charge non médicamenteuse de l'insomnie en établissements d'hébergement

pour personnes âgées dépendantes

https://dumas.ccsd.cnrs.fr/dumas-02516557

 

Duy Thai Nguyen. Evaluation de déterminants influençant le sommeil : effets de l’activité physique,

et des caractéristiques de population (âge et handicap). Santé. Université Grenoble Alpes [2020-..],

2021. Français. NNT : 2021GRALS038. tel-03642096

https://theses.hal.science/tel-03642096/

 

Traitement des troubles du sommeil par thérapies cognitivo-comportementales dans la fibromyalgie :

intérêt sur la douleur et la qualité de vie

Elodie COUTURIER - Mémoire UE28 - Année scolaire : 2021-2022

RÉGION DES PAYS DE LA LOIRE - Institut Régional de Formation aux Métiers de la Rééducation et de la Réadaptation

https://kinedoc.org/work/kinedoc/Nantes-2022-COUTURIER-Rhumatologie.pdf

 

Élaboration et évaluation d’un guide de thérapie cognitivo-comportementale pour le traitement autonome de l’insomnie chronique : étude “ Read & Sleep ”

Brice-Diego Castiel Submitted on 20 May 2020

https://dumas.ccsd.cnrs.fr/dumas-02613619v1

 

Prise en charge de l’insomnie chronique : analyse d’un atelier du sommeil à Nantes

Thèse d’exercice / Université de Rennes 1 - Faculté de Médecine

Thèse en vue du diplôme d’état de docteur en médecine

Anne-Claire DUFLOT épouse LE ROUX

https://dumas.ccsd.cnrs.fr/dumas-02145706/document

 

Présentée pour le diplôme d’état de Docteur en Médecine -  Tiphaine MONTALESCOT

Ressentis des médecins généralistes sur la prise en charge non médicamenteuse de l’insomnie chronique

https://medecine-generale.sorbonne-universite.fr/these/ressentis-des-medecins-generalistes-sur-la-prise-en-charge-non-medicamenteuse-de-linsomnie-chronique/

 

Thèse pour l’obtention du grade de Docteur en Médecine

Présentée et soutenue publiquement le mercredi 28 octobre 2020 - CARALP Augustin

La pratique des Thérapies Comportementales et Cognitives par les médecins généralistes du

Calvados dans l’insomnie chronique des patients âgés de 18 à 65 ans.

https://dumas.ccsd.cnrs.fr/dumas-03205189/document

 

Sylvain Dagneaux « Prendre en charge l’insomnie par les TCC »

Benjamin Lubszynski « Bien dormir, ça s’apprend ».

Une liste d’ouvrages sur l’insomnie et abordant pour certains d’entre eux les TCC-I est disponible sur l’espace documentation du site du Réseau Morphée (56).

 

Faire la lumière sur notre activité nocturne

Modifié le : 08/11/2024 Publié le : 07/08/2017 Temps de lecture : 20 min

https://www.inserm.fr/dossier/sommeil/

Chronobiologie, Les 24 heures chrono de l’organisme

https://www.inserm.fr/dossier/chronobiologie/